Le contrat de cautionnement
Cautionnement pour un bail « loi 1989 » : quand et comment ?
Réglementation
Dans le cadre de la location d’un logement, loué nu à titre de résidence principale, un bailleur peut demander au locataire de lui fournir une caution dans les conditions fixées par l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989.
Depuis la loi Alur du 24 mars 2014, les règles s’appliquent pour la location en meublé d’un logement à titre de résidence principale (loi de 1989, art. 25-3). Elles s’appliquent également pour un bail mobilité, qui est un contrat de location de courte durée d'un logement (loi de 1989, art. 25-12).
Un bailleur « personne physique » peut demander une caution s’il ne dispose pas, par ailleurs, d’une assurance (ou toute autre forme de garantie) garantissant les obligations du locataire (en clair, une assurance loyers impayés). Cette règle de « non-cumul » (caution/assurance) vaut si un bailleur souscrit une assurance à titre personnel ou par le biais de son mandataire (assurance groupe dite pour compte), mais aussi si celui-ci offre sa propre garantie pour des impayés (technique dite du « ducroire »).
Pour un logement loué à un étudiant ou apprenti, un bailleur peut continuer de « cumuler » caution et assurance.
La loi permet un tel cumul (assurance, cautionnement) uniquement pour un logement loué à un étudiant, ou un apprenti (loi du 06.07.1989, art. 22-1). Pour les pouvoirs publics, « au contraire des étudiants et des apprentis, les titulaires d’un contrat de professionnalisation sont des salariés (...) et s’ils sont, eux aussi, en situation d’alternance, ils ne disposent pas du statut d’apprenti ». Les intéressés « ne peuvent donc prétendre au cumul entre le cautionnement d’une personne physique et une autre garantie locative ». Ils peuvent néanmoins bénéficier du dispositif Visale, sous conditions (rép. min. : JOAN 15.10.2019 p. 9276 n° 22095).
Ces règles s’appliquent également si le bailleur est une SCI « familiale » (constituée entre parents et alliés jusqu’au quatrième degré). Hors SCI familiale, et sous réserve de ne pas souscrire d’assurance, un bailleur « personne morale » ne peut en principe demander qu’un cautionnement apporté par un organisme figurant dans la liste fixée, en l’état, par un décret n° 2009-1659 du 28 décembre 2009. Les organismes sont :
- les fonds de solidarité pour le logement
- les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction
- les associations auxquelles un fonds de solidarité pour le logement ou un fonds local accorde sa garantie
- tous les organismes ou associations qui apportent, à titre gratuit, leur caution à un candidat à la location afin de favoriser son accès au logement.
La « caution » personnelle ne peut être demandée que pour un logement loué à un étudiant non-boursier.
Ainsi, si un bailleur est une personne physique ou une SCI familiale, hors location à un étudiant ou apprenti, il ne peut demander une caution que s’il ne dispose pas d’une assurance « loyers impayés » souscrite à titre personnel ou via un ADB (y compris en « ducroire »). Hors SCI familiale, une caution personnelle ne peut être demandée par une personne morale que pour un logement loué à un étudiant non-boursier.
Pour contourner les restrictions légales, il peut être tentant d’exiger d’un locataire que l’un de ses proches « cosigne » son bail. C’est à proscrire. Un bailleur qui imposerait la cosignature d’un ascendant ou descendant d’un locataire risque une amende pouvant atteindre 3 000 € (personne physique) et 15 000 € pour une personne morale (loi de 1989, art. 22-2).
Un bailleur, qui en passe par le dispositif « Visale » avec un locataire, ne peut lui réclamer le cautionnement d’un tiers. Il ne peut en outre d’emblée cumuler d’autres formes de garanties pour les loyers (assurance GLI).
Choix de la caution. Un bailleur ne peut refuser la caution présentée pour des motifs « discriminatoires », au motif qu’elle ne possède pas la nationalité française, ou au motif qu’elle ne réside pas sur le territoire métropolitain. Veillez par ex. à ne pas « imposer » une caution parentale, ce qui est jugé discriminant (éviter la mention « caution des parents exigée » dans des annonces).
En application de l’article 22-2 de la loi du 6 juillet 1989, un décret n° 2015-1437 du 5 novembre 2015 fixe une liste (limitative) des pièces justificatives pouvant être demandées par un bailleur (ou son mandataire) à une caution (annexe II). Les manquements au décret sont punissables d’une amende administrative, dont le montant peut atteindre 3 000 € (personne physique) et 15 000 € (personne morale).
Notons que, pour une caution personne physique, le décret permet de lui demander une pièce justificative d’identité en cours de validité, parmi les documents suivants : carte nationale d’identité, passeport, permis de conduire. Pour un candidat locataire étranger, le décret vise aussi un document justifiant du droit au séjour : carte de séjour temporaire, de résident, ou de ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (décret de 2015 ann. I et II, A). Depuis un décret n° 2019-1019 du 03.10.2019 (JO du 05.10.2019), le texte ne fait plus référence à la signature du titulaire de la pièce d’identité.
Il est toujours possible de demander une pièce d’identité avec une photographie. Si la pièce produite peut être une simple copie, le document original doit pouvoir être présenté, à votre demande.
Formalisme
Un acte de cautionnement doit respecter le formalisme prévu par l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989.
La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (JO du 24 novembre 2018), dite loi Elan, est venue modifier la rédaction de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989.
La mention manuscrite, jusqu’ici requise d’une personne physique se portant caution d’un locataire, a été supprimée.
Il n’en reste pas moins que tout bailleur, agent immobilier ou ADB, notamment, doit veiller à ce qu’un acte de cautionnement comporte bien toutes les mentions légales requises, à peine de nullité.
L’article 22-1 de la loi de 1989 précise à cet égard que la «personne physique qui se porte caution signe l’acte de cautionnement faisant apparaître le montant du loyer et les conditions de sa révision tels qu’ils figurent au contrat de location, la mention exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance qu’elle a de la nature et de l’étendue de l’obligation qu’elle contracte ainsi que la reproduction de l’avant-dernier alinéa du présent article. Ces formalités sont prescrites à peine de nullité du cautionnement ».
L’acte doit bien préciser le montant du loyer et les conditions de sa révision. Il est impératif de bien préciser les modalités de révision du loyer, en reprenant à la lettre celles fixées dans le bail. Dans une affaire, la Cour de cassation a jugé qu’une caution pouvait se prévaloir de la nullité de son engagement, car la mention manuscrite « ne respectait pas les exigences de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 imposant la reproduction de la mention du loyer et des conditions de sa révision telles qu’ils figurent dans le contrat de location » (Cass. 3e civ. 06.09.2018 n° 17-17351).
Une mention formelle dans l’acte de cautionnement doit en outre exprimer « de façon explicite et non équivoque » la connaissance que la caution a de la nature et de l’étendue de ses obligations.
L’acte de cautionnement doit aussi impérativement reproduire la mention légale suivante :
« Lorsque le cautionnement d’obligations résultant d’un contrat de location conclu en application du présent titre ne comporte aucune indication de durée ou lorsque la durée du cautionnement est stipulée indéterminée, la caution peut le résilier unilatéralement. La résiliation prend effet au terme du contrat de location, qu’il s’agisse du contrat initial ou d’un contrat reconduit ou renouvelé, au cours duquel le bailleur reçoit notification de la résiliation. »
Notons que, pour la Cour de cassation, le formalisme imposé « se justifie par le motif d’intérêt général de protection de la caution » et la sanction applicable en cas de non-respect « n’apparaît pas, quelle que soit la qualité du bailleur, disproportionnée à la finalité de la loi qui tend, en contrepartie de la faculté accordée au bailleur d’exiger un cautionnement et de son régime dérogatoire au droit commun, à protéger la caution en privant d’effet un acte qui ne respecte pas les conditions de forme permettant de s’assurer du caractère éclairé de son consentement » (Cass. 3e civ. 03.12.2015 n° 15-18194).
La Cour de cassation a également jugé que « les formalités édictées par l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 sont prescrites afin d'assurer la validité et non la preuve de l'acte de cautionnement » (Cass. 3e civ. 23.01.2020 n° 18-23900). Il a été également jugé que les formalités édictées par le texte sont prescrites à peine de nullité de l'acte, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un grief (Cass. 1e civ. 22.05.2019 n° 18-14764).
Le bailleur doit aussi remettre à la caution un exemplaire du contrat de location. Cette formalité est également prescrite à peine de nullité du cautionnement.
Des mentions manuscrites particulières, prévues par le Code de la consommation, sont exigées dans un contrat de cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d’un bailleur professionnel, à peine de nullité de son engagement. En outre, et dans ce cas, les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion sont réputées non écrites si l’engagement de la caution n’est pas limité à un montant global, expressément et contractuellement déterminé, incluant le principal, les intérêts, les frais et accessoires. À défaut, la solidarité est écartée et le cautionnement requalifié en cautionnement simple.
Lorsque c’est matériellement possible, faire « intervenir » la caution à la signature d’un bail est une sage précaution, mais il est seulement exigé qu’un exemplaire du bail lui soit remis (c’est impératif, à peine de nullité de son engagement). Nous conseillons en tout état de cause d’annexer, à l’acte de cautionnement, une copie du bail daté et signé du locataire.
Modalités de l’engagement
Durée. Un contrat de cautionnement peut être régularisé pour une durée déterminée (par exemple la durée du bail initial, soit trois ou six ans) ou à durée indéterminée. Prévoir une durée indéterminée pour l’engagement de la caution est ainsi possible, mais en pareil cas la caution pourra unilatéralement résilier son engagement. Cette résiliation ne prendra effet qu’au terme du bail (initial, ou renouvelé) ou de la période tacitement renouvelée au cours de laquelle elle a été notifiée au bailleur.
Montant. La caution ne peut être obligée de payer plus que le locataire. Son engagement peut couvrir les loyers, les charges, mais aussi les éventuels frais de remise en état ou une indemnité d’occupation.
Si le cautionnement est donné pour un montant indéterminé (sans plafond) par une personne physique, il faut prévoir d’informer la caution, au moins une fois par an, de l’évolution du montant de la créance garantie et de ces accessoires (loyers, charges, etc.), à peine de « déchéance » pour pouvoir recouvrer les intérêts, frais et pénalités liés à des arriérés.
Cautionnement simple ou solidaire. Le cautionnement peut être simple ou solidaire. Simple, il confère à la caution deux « bénéfices ». D’une part, un bénéfice de division, qui permet à la caution d’exiger du bailleur qu’il divise ses poursuites entre toutes les cautions (C. civil, art. 2303 et s.). D’autre part, un bénéfice de discussion, qui lui permet de contraindre le bailleur à poursuivre, préalablement, le locataire (art. 2298 et s. C. civ.).
En renonçant au bénéfice de division et discussion, et en s’engageant avec une clause expresse de solidarité, la caution s’engage à payer dès que le bailleur lui en fait la demande.
Bailleur professionnel. Des mentions manuscrites particulières, prévues par le Code de la consommation, sont exigées dans un contrat de cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d’un créancier professionnel, à peine de nullité de son engagement (C. consom. art. L 331-1 et s.). En outre, et dans ce cas, les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion sont réputées non écrites si l’engagement de la caution « n’est pas limité à un montant global, expressément et contractuellement déterminé, incluant le principal, les intérêts, les frais et accessoires ». À défaut, la solidarité est écartée et le cautionnement requalifié en cautionnement simple.
Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution, envers un créancier professionnel, doit faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci :
« En me portant caution de X...................., dans la limite de la somme de.................... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de...................., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X.................... n'y satisfait pas lui-même. »
Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante :
« En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du Code civil et en m'obligeant solidairement avec X je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X ».
Les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion, figurant dans un contrat de cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d'un créancier professionnel, sont réputées non écrites si l'engagement de la caution n'est pas limité à un montant global, expressément et contractuellement déterminé, incluant le principal, les intérêts, les frais et accessoires.
Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement.
Le créancier professionnel doit faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, il doit rappeler la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
Colocation. Un acte de cautionnement « des obligations d’un ou de plusieurs colocataires résultant de la conclusion d’un contrat de bail d’une colocation identifie nécessairement, sous peine de nullité, le colocataire pour lequel l’extinction de la solidarité met fin à l’engagement de la caution » (loi de 1989, art. 8-1 VI). En clair, une caution ne peut s’engager qu’au profit d’une personne déterminée et un acte de cautionnement doit impérativement identifier, sous peine de nullité, le colocataire concerné.
Cette règle s’applique pour toute « colocation » au sens de l’article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989. À cet égard, est concernée « la location d’un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale, et formalisée par la conclusion d’un contrat unique ou de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur, à l’exception de la location consentie exclusivement à des époux ou à des partenaires liés par un pacte civil de solidarité au moment de la conclusion initiale du contrat ». Une location consentie exclusivement à un couple marié ou pacsé n’est pas concernée.
L’article 8-1 VI de la loi de 1989, précise que : « La solidarité d'un des colocataires et celle de la personne qui s'est portée caution pour lui prennent fin à la date d'effet du congé régulièrement délivré et lorsqu'un nouveau colocataire figure au bail. À défaut, elles s'éteignent au plus tard à l'expiration d'un délai de six mois après la date d'effet du congé. » Cette règle s’applique pour un bail à venir ou signé depuis le 27 mars 2014. En tenant compte de cette limite, il reste possible de prévoir une solidarité entre colocataires. Malgré ce que laisse croire une « note » diffusée par les pouvoirs publics, pour rendre des colocataires solidaires au titre des loyers et charges, il reste à cet égard, à notre avis, indispensable de prévoir une clause expresse de solidarité dans leur(s) contrat(s) de location. En l’absence de « stipulation expresse visant les indemnités d’occupation, la solidarité ne peut s’appliquer qu’aux loyers et charges impayés » (Cass. 3e civ. 12 janvier 2017).
Bail mobilité. Dans le cadre d’un bail mobilité, le contrat de location ne peut comporter aucune clause prévoyant une solidarité entre les colocataires ou leurs cautions. Cette clause est réputée non écrite (loi de 1989, art. 25-13 II).
Modèle
Le modèle que nous proposons, qui porte sur un acte de cautionnement solidaire, doit être adapté au cas par cas.