Vente d’un terrain à bâtir
Se prémunir avec une reconnaissance de conseils donnés...
Hypothèse concernée
Un acquéreur souhaite acheter un terrain à bâtir en vue d’y construire une maison. Il est à ce titre prévu de régulariser un acte de vente avec un simple certificat d’urbanisme dit opérationnel (CUb), un permis de construire qui n’est pas encore définitif, ou encore une simple « note de renseignements d’urbanisme ».
Reconnaissance de conseils donnés
Lorsque l’acquéreur d’un terrain fait part de son intention d’y construire, tout notaire instrumentaire (et intervenant en concours) sera bien avisé de l’informer des « conséquences que peuvent avoir les règles d’urbanisme sur le projet immobilier » (cf. CA Grenoble 01.09.2015).
La Cour de cassation a par exemple approuvé la condamnation de notaires, chargés de finaliser une vente, pour manquement à leur obligation de conseil, là où ils s’étaient « contentés » de solliciter une (simple) note de renseignements d’urbanisme. Pour les juges, ils avaient manqué à leurs obligations en « omettant d’éclairer les acquéreurs sur le risque qu’ils encouraient en s’engageant sans certitude que le permis de construire pouvant être délivré devienne définitif » (Cass. 3e civ. 24.11.2016 n° 15-26226).
Lorsque cela est possible, l’idéal est que l’acquéreur et le vendeur négocient d’emblée un avant-contrat comprenant une condition suspensive portant sur un permis de construire définitif et purgé de tout recours.
À défaut, une reconnaissance de conseils donnés s’impose sur l’aléa et les risques pris (y compris avec un certificat d’urbanisme opérationnel).
Un agent immobilier, chargé de la rédaction d’un avant-contrat de vente, sera bien avisé de prendre les mêmes précautions.
Jurisprudence récente. Au regard de la jurisprudence, le rédacteur d’un acte de vente sera également bien avisé de prévoir de justifier qu’il a utilement exercé son devoir d’information et de conseil si son acte est régularisé avec un certificat d’urbanisme dit opérationnel (CUb). Une affaire récente est à méditer. Par le biais d’un agent immobilier, un marchand de biens avait régularisé, avec un couple d’acquéreurs, un compromis de vente portant sur un terrain à bâtir. La vente avait ensuite été finalisée chez un notaire. Le couple avait demandé ensuite un permis de construire (PC) sur le terrain. Mais il avait été refusé, le terrain s’avérant inconstructible au vu du plan local d’urbanisme (PLU) en vigueur. Le couple avait alors décidé, notamment, de demander réparation au notaire, qui a dressé l’acte final de vente, pour manquement à son devoir de conseil. En défense, le notaire a expliqué notamment qu’il avait obtenu, pour garantir l’efficacité de son acte, un certificat d’urbanisme (CU), dont il ressortait que le terrain était constructible. La Cour de cassation vient de censurer l’arrêt d’appel, qui avait donné raison au notaire, pour le motif suivant. Un « certificat d’urbanisme, document purement informatif, n’ayant pas pour objet d’autoriser une construction ou la réalisation d’une opération immobilière, le notaire se devait d’appeler l’attention des acquéreurs sur le fait qu’un tel document ne permettait pas de vérifier la constructibilité du terrain » au vu du PLU (Cass. 1e civ. 31.01.2018 n° 17-13303 – dans le même esprit Cass. 1e civ. 20.03.2014 n° 13-14121).
La décision invite, au titre du devoir de conseil, à faire preuve de grande rigueur pour la vente d’un terrain, si l’acquéreur vous informe d’un projet de construction (cf. aussi p.ex. Cass. 3e civ. 16.11.2017 n° 15-26830).
En pareil cas, il est impératif de conseiller aux parties de régulariser un compromis avec une condition suspensive portant sur l’obtention d’un PC, conforme au projet de l’acquéreur. Si le vendeur est d’accord pour insérer cette condition suspensive, elle doit être rédigée avec soin, avec reconnaissance de conseils donnés, en fonction de ce qui est négocié (cf. modèle distinct).
Si un acquéreur se satisfait, dans un compromis, d’une « note d’urbanisme » et (mieux) une condition suspensive pour l’obtention d’un CU, y compris opérationnel (CUb), il convient d’attirer son attention sur les limites juridiques du document. Veillez, dès le compromis puis dans l’acte définitif, à insérer une clause de reconnaissance de conseils donnés sur les risques de s’engager sans disposer d’un PC définitif. Un notaire doit faire le nécessaire même s’il intervient uniquement pour l’acte final. Il est sage de préciser, dans un compromis, que l’acquéreur a été aussi avisé de la faculté d’insérer une condition résolutoire.
Notons que la jurisprudence apprécie avec rigueur le devoir de conseil en présence d’un acquéreur « profane ». Elle semble plus « modérée » s’il est un professionnel de l’immobilier. La responsabilité d’un notaire a été écartée, là où il n’avait pas alerté un marchand de biens sur la fin prochaine de validité d’un CU, et ses effets (Cass. 3e civ. 24.09.2013 n° 12-24749). Celle d’un agent immobilier a été écartée à l’égard d’un promoteur « à même d’apprécier les risques de l’opération » (CA Douai 05.09.2011).