La Cour de cassation a rendu le 5 juin 2024 un important arrêt qui intéresse les contrats de franchise portant sur l'exploitation d'une agence immobilière. Que faut-il savoir?
La loi n°2015-990 du 6 août 2015 a créé deux textes spécifiques visant à réglementer certains contrats conclus dans le cadre de «réseaux de distribution commerciale» (C. com. arts. L. 341-1 et L. 341-2).
Les textes s'appliquent pour des contrats, notamment des contrats de franchise, conclus entre une «tête de réseau» et une personne exploitant «un magasin de commerce de détail» (C. com. art. L. 341-1 - cliquer ici).
L'article L. 341-2 du Code de Commerce précise que toute clause ayant pour effet, après l'échéance ou la résiliation d'un contrat concerné, de «restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale» de l'exploitant, en clair une clause de non-concurrence ou de non-affiliation post-contractuelle, est réputée non écrite si elle ne remplit pas certaines conditions cumulatives. La durée de la clause ne doit pas excéder un an, notamment (C. com. art. L. 341-2 - cliquer ici).
Le texte est entré en vigueur le 6 août 2016.
La Cour de cassation a jugé que le texte ne s'appliquait pas aux contrats conclus avant cette date (cass. com.16-2-2022 n°20-20429 - cliquer ici ; cass. com. 30-8-2023 n°22-20076 - cliquer ici).
Dans une affaire opposant un franchiseur et d'anciens franchisés, la Cour de cassation a été appelée à se prononcer sur l'applicabilité du texte pour des contrats de franchise portant sur l'exploitation d'une agence immobilière.
En l'espèce, les anciens franchisés contestaient la licéité de clauses de non-(ré)affiliation post-contractuelle prévues dans des contrats de franchise.
Le franchiseur a soutenu qu'une activité de service ne peut être qualifiée de «commerce de détail», en l'absence de vente de marchandises à des consommateurs.
Soulignant que la notion de «commerce de détail» n'est pas définie par le texte, ni dans les autres textes du Code de commerce utilisant cette notion, la Cour de cassation a adopté le raisonnement suivant.
L'article L. 341-2 du Code de commerce «vise à mettre un terme aux pratiques contractuelles des réseaux de distribution commerciale qui restreignent la liberté d'entreprendre de leurs affiliés, exploitants de commerce de détail, en dissuadant les changements d'enseigne. Son objectif est de faciliter les changements d'enseigne en vue d'augmenter le pouvoir d'achat des consommateurs, de diversifier l'offre, tout en permettant aux commerçants de faire jouer la concurrence entre enseignes, notamment au niveau des services que celles-ci proposent».
Le législateur a «ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général qui ne justifie aucune différence de traitement entre les réseaux, selon qu'ils exercent une activité de vente de marchandises ou une activité de services».
Pour la Cour de cassation, il en résulte que la notion de commerce de détail ne «peut être entendue au sens de la seule vente de marchandises à des consommateurs et peut couvrir des activités de services auprès de particuliers, telle une activité d'agence immobilière» (cass. com. 5-6-2024 n°23-15741 - en appel: CA Paris 8-2-2023 RG n°20/14328 Portalis 35L7-V-B7E-CCOON - cliquer ici).
L'arrêt du 5 juin 2024 met un terme, à ce sujet, aux discussions qui existaient jusqu'ici concernant la portée de l'article L. 341-2 du Code de Commerce.
- Pour consulter l'arrêt du 5 juin 2024: cliquer ici
Il découle de l'arrêt du 5 juin 2024 qu'un contrat de franchise conclu entre un franchiseur et l'exploitant d'une agence immobilière doit donc respecter la réglementation prévue par les articles L. 341-2 et L. 341-2 du Code de commerce.
Référence
- Cour de cassation, chambre commerciale, 5 juin 2024 n°23-15741
Les contrats de franchise portant sur l'exploitation d'une agence immobilière sont concernés par la réglementation spécifique, créée par la loi n°2015-990 du 6 août 2015, pour les clauses de non-concurrence ou de non-réaffiliation.