Mise en demeure pour impayés

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Recouvrer des impayés en copropriété

Faire face aux mauvais payeurs

Ce que peut réclamer le syndic

En vertu de l’article 35 du décret du 17 mars 1967, en l’état du droit applicable au 1er janvier 2019, le syndic en exercice peut (notamment) exiger le versement :

  • de l’avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété, laquelle ne peut excéder 1/6 du montant du budget prévisionnel.
  • des provisions du budget prévisionnel, prévues à l’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965.
  • des provisions pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel prévues à l’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 et énoncées à l’article 44 du décret.
  • des avances correspondant à l’échéancier prévu dans le plan pluriannuel de travaux adopté par l’assemblée générale.
  • des avances constituées par les provisions spéciales prévues par l’article 18 de la loi.

Pour l’exécution du budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, par lettre simple, préalablement à la date d’exigibilité, un avis indiquant le montant de la provision exigible.

Pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel, le syndic adresse à chaque copropriétaire, par lettre simple, préalablement à la date d’exigibilité déterminée par la décision d’assemblée générale, un avis indiquant le montant de la somme exigible et l’objet de la dépense.

Impayé

C’est une des tâches essentielles du syndic en exercice que de recouvrer tout impayé auprès des copropriétaires. Il doit à cet égard mener l’ensemble des diligences utiles à cet effet dans un délai raisonnable, sous peine d’engager sa responsabilité.

Charges. En vertu de l’article 10 de la loi du 10.07.1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun, ainsi qu’aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes. Il a été jugé que le « vice de construction de l’immeuble, à le supposer caractérisé, n’exemptait pas » les copropriétaires de « leur obligation au paiement des charges de copropriété » (Cass. 3e civ. 13.09.2018 n° 17-17514).

En bon sens, un syndic de copropriété n’a pas besoin de disposer d’une autorisation de l’assemblée générale pour agir en justice en recouvrement de créance au nom du syndicat des copropriétaires. Un syndic doit rendre compte à chaque assemblée des actions éventuellement introduites.

Il en va de même pour la mise en oeuvre de voies d’exécution forcée, à l’exception d’une saisie en vue de la vente d’un lot (décret du 17.03.1967, art. 55 al. 2).  

Mise en demeure

En présence d’impayés, une mise en demeure du copropriétaire défaillant est indispensable pour faire courir les intérêts dus en principe au profit du syndicat, sauf stipulation contraire du règlement de copropriété. Cet intérêt est fixé au taux légal en matière civile.

Il convient par principe d’en passer par une LRAR pour notifier une mise en demeure.

La loi Alur du 24 mars 2014 a toutefois admis que les mises en demeure adressées par un syndic, sous réserve de l’accord exprès des copropriétaires, puissent être « valablement faites par voie électronique ». Un décret du 21 octobre 2015 (JO du 23 octobre 2015) est venu finaliser le dispositif, qui est entré en vigueur le 24 octobre 2015. Pour être valable, la mise en demeure doit être notifiée par une lettre recommandée électronique (LRE), délivrée par un opérateur, dans les conditions désormais fixées par l’article L 100 du Code des postes et des communications électroniques.

Un décret n° 2018-347 du 09.05.2018, publié le 12.05.2018, a fixé le nouveau cadre réglementaire applicable pour une LRE (CPCE art. R 53 à R 53-4). Les nouveaux textes sont entrés en vigueur le 1er janvier 2019. Un syndic doit prendre soin, à cet égard, de bien tenir compte de ces nouveaux textes.

En tout état de cause, pour en passer par une LRE à l’égard d’un copropriétaire, son « accord exprès » est exigé. Celui-ci peut/doit être formalisé de deux manières. Soit le copropriétaire notifie son accord par LRAR (ou LRE) au syndic, lequel doit alors l’enregistrer (à la date de réception de la LR). Soit cet accord est « formulé » lors d’une AG, et il doit alors être « consigné » sur le p.-v. de l’AG. Si un copropriétaire donne son accord pour la LRE, il lui revient de notifier son « adresse électronique » au syndic. C’est cette adresse qui sera à utiliser pour pouvoir notifier une LRE. En tout état de cause, une LRE sera à notifier à la dernière adresse (courriel) notifiée par le copropriétaire, pour être valable. Il est à noter que, là où un copropriétaire donne son accord pour la LRE, il peut ensuite faire machine arrière (le retirer) en notifiant sa décision au syndic par LRAR (ou LRE). Sa décision prendra effet le lendemain du jour de la réception de la LR.

Toutes les mises en demeure sont concernées, à l’exception de celle préalable à l’inscription d’une hypothèque légale, pour laquelle un acte d’huissier est/reste exigé.

Réparation complémentaire

À l’égard d’un mauvais payeur. La Cour de cassation admet qu’un syndicat des copropriétaires (SDC), et en pratique le syndic de copropriété, puisse réclamer en justice à un copropriétaire « défaillant », en plus des intérêts moratoires dus, une réparation complémentaire (p.ex. Cass. 3e civ. 03.11.2016 n° 15-24793).

Par exemple, dans une affaire, un copropriétaire ne payait plus ses charges depuis près de 10 ans, alors même que les appels de fonds étaient justifiés. Il a été jugé que ses « manquements systématiques et répétés à son obligation essentielle (...) de régler les charges de copropriété étaient constitutifs d’une faute qui causait à la collectivité des copropriétaires, privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l’entretien de l’immeuble, un préjudice financier, direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires » (cass. 3e civ. 12.07.2018 n° 17-21518).

Ce droit à réparation, régi par l’article 1231-6 al. 4 du Code civil, est ouvert à une double condition cumulative : la « mauvaise foi » du copropriétaire, et l’existence pour le SDC d’un « préjudice indépendant de celui résultant du retard de paiement » (par ex. Cass. 3e civ. 15.12.2016 n° 15-24760 et 20.10.2016 n°15-20587). Il faut prouver un préjudice (financier) certain et distinct de celui réparé par les intérêts moratoires (p.ex. trouble de trésorerie).

Un syndic n’a pas besoin d’une autorisation en assemblée générale pour formuler la demande d’indemnisation en justice, si elle est un accessoire à une demande en recouvrement de charges (Cass. 3e civ. 25.01.2012 n° 10-19180).

La Cour de cassation a également jugé que tout copropriétaire pouvait aussi, à titre personnel, demander réparation en justice de ses propres préjudices à un copropriétaire défaillant, au titre de la responsabilité délictuelle (C. civ. art. 1240), sous conditions (Cass. 3e civ. 07.09.2017 n° 16-18777). Dans une relance ou mise en demeure d’un copropriétaire pour des impayés, un syndic peut avoir intérêt d’évoquer le recours ainsi reconnu aux autres copropriétaires. Cela peut (éventuellement) « inciter » l’intéressé à régulariser (plus vite) sa situation.

Rémunération du syndic

En vertu de l’article 10-1 de la loi du 10.07.1965, sont imputables au seul copropriétaire concerné les « frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur ».

La loi Alur du 24 mars a prévu que les honoraires ou frais perçus par le syndic au titre des prestations réalisées ne pourront excéder un montant fixé par décret. Ce décret n’avait pas encore été publié au 1er janvier 2018.

Il a été jugé que les textes issus de la loi Alur permettaient bien aux pouvoirs publics de fixer par décret un plafond pour les frais de recouvrement des charges (CE 05.10.2016 n° 390465 et 390491).

Dans son contrat, un syndic doit veiller à bien indiquer sa tarification pratiquée pour les frais de recouvrement liés aux démarches suivantes :

  • mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception ;
  • relance après mise en demeure ;
  • conclusion d'un protocole d'accord par acte sous seing privé ;
  • frais de constitution d'hypothèque ;
  • frais de mainlevée d'hypothèque ;
  • dépôt d'une requête en injonction de payer ;
  • constitution du dossier transmis à l'auxiliaire de justice (uniquement en cas de diligences exceptionnelles) ;
  • suivi du dossier transmis à l'avocat (uniquement en cas de diligences exceptionnelles).

Incidence de la réforme ELAN

Procédure « 19-2 ». Depuis la loi SRU de 2000, l’article 19-2 (al. 1 et 2) de la loi du 10.07.1965 organise une procédure spécifique, destinée à faciliter le recouvrement de certaines sommes auprès d’un copropriétaire défaillant. Cette procédure (dite « 19-2 ») vise à permettre, en cas d’impayé, entendu comme le défaut de versement d’un appel de fonds à sa date d’exigibilité, et après une mise en demeure restée infructueuse (30 jours), de rendre « immédiatement exigibles » d’autres sommes (on parle de déchéance du terme).

Jusqu’à récemment, en cas d’impayé d’une provision prévue à l’article 14-1 de la loi, les autres provisions prévues par ce texte « et non encore échues » devenaient exigibles. Étaient donc (seules) concernées des provisions dues au titre du budget prévisionnel voté chaque année en AG. La Cour de cassation avait en outre jugé qu’un copropriétaire ne pouvait être condamné, au titre de l’article 19-2, qu’au « versement des provisions pour charges de l’année en cours échues et impayées prévues par un budget prévisionnel régulièrement voté » (Cass. 3e civ. 20.06.2012 n° 11-16307). La procédure « 19-2 » ne pouvait être utilisée pour des impayés de charges d’un exercice antérieur (Cass. 3e civ. 22.09.2010 n° 09-16678).

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (JO du 24.11.2018), dite loi Elan, a entendu faciliter la tâche d’un syndic, en modifiant la procédure prévue par l’article 19-2 de la loi de 1965.

Désormais, le texte légal précise qu’en cas d’impayé d’une provision due au titre des articles 14-1 et 14-2 (I), les « autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles ». La procédure 19-2 peut donc être utilisée pour des provisions au titre de dépenses pour travaux (non comprises dans le budget prévisionnel), et n’est plus limitée aux charges d’une année en cours.

La procédure « 19-2 » peut aussi être utilisée pour recouvrer des appels de cotisations au titre du fonds de travaux « Alur ».

Procédure « 19-2 » : mise en œuvre. Un syndic doit en passer par une mise en demeure du copropriétaire concerné. Cette mise en demeure, à notifier par LRAR (voire une LRE), est impérative pour déclencher la déchéance du terme, si elle est infructueuse. Si la mise en demeure reste vaine pendant 30 jours, le président du TGI, statuant comme en matière de référé, peut être saisi. Désormais, à la suite de la loi Elan, le juge, après avoir constaté l’approbation en AG « du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles » (loi du 10.07.1965 art. 19-2, al. 2) . Si les conditions sont réunies, la condamnation du copropriétaire paraît de droit (et non plus une faculté, comme par le passé).

Notons que l’ordonnance du juge était jusqu’ici assortie de l’exécution provisoire de plein droit. Cette règle a été supprimée, de sorte que le juge peut en décider autrement (C. proc. civ. art. 492-1).

Notons que si un budget prévisionnel ne peut être voté qu’en cours d’exercice comptable, un syndic peut être autorisé en AG à appeler successivement deux provisions trimestrielles, chacune égale au quart du budget précédemment voté. Dans ce cas, un texte précise, en l’état que la procédure 19-2 ne s’applique pas (décret du 17.03.1967 art. 43, al. 2) .

Ordonnances. Il est à noter que la loi Elan a habilité le gouvernement à prendre deux ordonnances, concernant les copropriétés.

Sous 12 mois à compter de la promulgation de la loi Elan, intervenue le 23 novembre 2018, le gouvernement pourra prendre par ordonnance des mesures visant, à partir du 01.06.2020, à « améliorer la gestion des copropriétés, et à prévenir les contentieux ». L’objectif est notamment de « clarifier, moderniser, simplifier et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété ».

Sous 24 mois à compter de la promulgation de la loi Elan, intervenue le 23 novembre 2018, le gouvernement pourra, par ordonnance, mettre en place un « code relatif à la copropriété des immeubles bâtis », afin de « regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété ».

Ces deux ordonnances n’avaient pas été publiées, au 1er janvier 2019.

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